Une assemblée générale prolifique en échanges : Transition écologique, PADDUC, processus de Beauvau, au coeur des problématiques des maires

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L’assemblée générale des maires et des présidents s'était délocalisée, une fois n'est pas coutume, sur la commune de San Giuliano, le 24 février. De nombreux sujets ont été évoqués au cours de cette réunion qui a rassemblé plus d'une centaine d'élus du département.

Dans son mot de bienvenue, le maire de San Giuliano, François-Xavier Ceccoli, a été clair en soulignant le rôle essentiel des élus de proximité. Une donne qui, selon lui, ne devrait pas être oubliée à l’occasion du processus de Beauvau : « Dans les grandes discussions qui accaparent la Corse, l’avis des élus de proximité devra être pris en compte en matière de moyens, en matière de contre-pouvoir démocratique. La Collectivité de Corse concentre tous les pouvoirs. Le rééquilibrage doit passer par les territoires. Nous avons plein de choses à faire, nous avons des routes à entretenir, des équipements publics à développer, des écoles à rénover, des réseaux d’eau à créer… Il y a des choses que nous ne pourrons pas faire seuls. Cruellement aujourd’hui, nous avons besoin pour la Haute-Corse d’un nouvel hôpital à Bastia. Nous avons besoin d’un centre anti-cancers en Haute-Corse, nous n’avons pas de Pet-scan, c’est un scandale incroyable. Sur la gestion de l’eau aussi, notre outil qui était dimensionné pour 180 000 habitants n’a pas évolué depuis les années 60-70. L’irrigation agricole aussi n’est plus la même puisque nous devons arroser aujourd’hui les vignes, ce qui n’était pas le cas dans les années 70. Personne ne peut imaginer comment il nous serait possible de financer les prochains équipements hydrauliques de la Corse avec notre seule fiscalité ! » 

Place ensuite à la présentation du rapport moral et financier de l’année 2023 par Ange-Pierre Vivoni, rappelant les initiatives à mettre au crédit de l’association comme l’organisation du Congrès des Maires en septembre dernier sur la thématique du logement ou encore son rôle d’interlocuteur auprès de l’Etat ou de la CDC notamment dans le cadre du processus de Beauvau : « Avec l’Association des Maires de Corse-du-Sud, nous sommes toujours intervenus pour préserver le bloc communal et intercommunal. Il n’y aura rien à craindre d’une évolution institutionnelle pour nos collectivités et EPCI car nous resterons toujours financées par la péréquation d’Etat. Une assemblée générale extraordinaire sur ce sujet de l’évolution institutionnelle sera organisée dans le courant de l’année pour permettre à chacun de nos collègues d’exprimer son point de vue. »

Une minute de silence fut ensuite rendue en hommage aux élus qui sont décédés ces derniers mois, des maires en exercice comme Michel Sorbara (Valle d’Orezza), Jean-Michel Simonetti (Canari) et Pierre-Jean Stefani (Piedipartino) mais aussi des anciens élus comme François Vendasi (Sénateur-Maire de Furiani), Alex Alessandrini (Antisanti), Albert Calloni (Bastia), Pancrace Guglielmacci (Calvi), Maurice Tristani (San Giovanni di Moriani) et André Giorgietti (Olcani).

Autre chapitre, celui de la pérennisation du GIRTEC et de son soutien apporté aux communes dans le cadre de la reconstitution des titres de propriétés et du cadastre. L’idée sera d’engager un nouveau dispositif de financement dépendant uniquement des municipalités et plus de l’Etat ni de la CDC.  Le troisième grand volet abordé au cours de cette assemblée générale a été celui de la procédure de  révision du PADDUC qui devra être lancée d’ici la fin de l’année pour une adoption en 2025. Le projet a été présenté par Julien Paolini, le président de l’Agence d’Aménagement et d’Urbanisme de la Corse. Ce nouveau PADDUC doit prévoir notamment une répartition plus équilibrée des possibilités de construction en fonction des territoires à contrario de la loi ZAN : « Le PADDUC de 2015 avait la volonté d’opérer un rééquilibrage. Son analyse sera présentée au printemps. Les objectifs de rééquilibrage n’ont pas été atteints tout comme la préservation des terres agricoles ou encore la réduction de l’artificialisation des sols. Malgré la volonté politique, sa mise en œuvre opérationnelle ne s’est pas concrétisée. La révision concernera la mise en conformité avec la loi ELAN, les secteurs déjà urbanisés, l’adaptation pour les communes se situant à la fois en loi littoral et montagne… »

La Corse a la possibilité, comme l’outremer, d’organiser sa propre copie quant aux objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Une loi ZAN bis qui représente une véritable opportunité selon le conseiller exécutif : « On pourra choisir de réduire, par exemple, que de 30% le droit à bâtir par rapport au continent où le taux est de 50%. On peut décider aussi de le réduire de 70% bien au-delà des objectifs fixés à l’échelle nationale et c’est la révision du PADDUC qui va permettre de faire ces choix. On peut également bien les répartir sur le territoire en favorisant, par exemple, les secteurs qui ont été moins urbanisés que d’autres. »  

Pour Francis Marcantei, le maire de Talasani : « Le projecteur positionné sur le m2 constructible me dérange beaucoup. Lorsque l’on regarde l’évolution de la population et sa situation dans notre île, on s’aperçoit que 95% des personnes habitent dans une altitude située entre 0 et 500 m. Nous construisons un périmètre fortement peuplé dans un désert intérieur. Si l’on suit Fernand Braudel, en continuant sur cette voie, nous sommes en train de construire une bombe à retardement. Evitons de tomber dans le gouffre en déplaçant un peu le projecteur car cela craint ! » Marie-Thérèse Mariotti, la maire de Taglio-Isolaccio souhaite de son côté un calendrier précis de révision générale du PADDUC : « Quand va-t-on pouvoir s’appuyer sur un PADDUC ayant à cœur l’équité ? Quand allons-nous avoir enfin un document opposable ? »  Une question majeure et cruciale car sans révision du PADDUC, point de possibilité de mener à bien l’élaboration d’un document d’urbanisme pour une commune et donc de maîtriser son territoire.

Pour le Préfet de la Haute-Corse, Michel Prosic : « Quand il n’y a pas de document d’urbanisme, c’est toujours plus délicat. Il faut sortir d’un régime dérogatoire. Le PADDUC est une chance pour la Corse. Nous avons besoin de cette révision. Le PADDUC a été une nouveauté. C’est difficile de partir de zéro et d’inventer un modèle qui soit immédiatement pertinent et qui corresponde aux besoins du territoire. L’enjeu est d’avoir une clarté. Plus nous sortirons du régime dérogatoire, plus nous serons en mesure d’organiser l’avenir de nos territoires. Le second enjeu est celui de la durée des vies des documents d’urbanisme. On peut tendre à 7 ou 10 ans, au-delà, cela devient beaucoup plus compliqué. La question de la durée de vie est fondamentale car nous rencontrons une situation très difficile. Les conditions climatiques évoluent très vite. Il suffit d’ouvrir sa fenêtre, il ne pleut plus et ce n’est pas normal. Ainsi, un schéma élaboré aujourd’hui ne vaudra peut-être plus rien d’ici une décennie. »

Une assemblée générale prolifique en échanges